Etat des lieux forestier du mois d’Octobre 2021 vu par l’Association Forestière de la Bruche
Après 3 années de sécheresse, la pluie est finalement revenue, arrosant régulièrement la région depuis l’hiver passé. Cette humidité et les températures peu élevées que nous avons connus au printemps et à l’été ont apporté un peu de répit à nos forêts permettant, tantôt à des arbres en pleine maturité de se reconstituer, tantôt à des semis de s’installer convenablement.
Cette accalmie ne sera sans doute que de courte durée. Les projections climatiques annoncent, dans tous les cas une augmentation des températures moyennes et une augmentation de la fréquence des épisodes climatiques extrêmes (tempêtes, sécheresses, inondations, etc.). Ces derniers contribueront à affaiblir les massifs, et à les rendre plus sensibles aux maladies et ravageurs existants ou à venir.
En parallèle, la tension sur la ressource bois augmente au niveau mondial. Cette situation a conduit cette année à une pénurie sur divers produits, impliquant des retards notamment dans le domaine du bâtiment, mais aussi une explosion des prix, du fait d’un effet d’appel d’air par la demande en bois des Etats Unis et de la Chine. Cette pénurie est vécue par beaucoup comme un paradoxe, puisque l’on estime pour 2020, dans le Grand Est, à 4 million de m3 exploités dans le cadre des coupes de bois scolytés, soit environ 10% du volume d’épicéa sur pieds et 4 fois le volume de bois d’œuvre d’épicéa récolté annuellement (source Fibois Grand Est).
Il faut toutefois rappeler que si la ressource bois ne manque pas en France, ce sont bien les infrastructures de transformations qui font défaut, puisque une part non négligeable des sciages vendus en France sont transformés à l’étranger. Les prix proposés par les Etats Unis et la Chine durant cette période, ayant été plus attractifs, une grande partie des bois sont partis vers ces pays, creusant l’écart entre l’offre et la demande en France et en Europe.
Cette situation met en lumière le point faible des choix sylvicoles qui ont été faits par le passé : si les hagis (plantation mono-spécifique d’épicéas) du Fond Forestier National ont pu être une solution dans le contexte de la déprise agricole, il est aujourd’hui plus qu’évident que la fragilité de ces peuplements face aux aléas climatiques est importante. Malheureusement pour les sylviculteurs, il n’y a ni certitude ni solutions toutes faites pour répondre aux défis de la forêt de demain. Les interventions sylvicoles à venir devront ainsi faire l’objet d’une réflexion préalable plus poussée, afin d’anticiper leurs impacts. Et, afin d’éviter à l’avenir les écueils que nous traversons, il est aujourd’hui indispensable de réaliser une étude de sol en préalable d’un projet de plantation permettant de choisir au mieux ses essences.
Heureusement, des initiatives ont été prises et des recherches sont en cours, telle que l’étude mandatée par la commune de Masevaux auprès de l’INRA et AgroParisTech sur l’avenir du sapin en vallée de la Doller, ou le projet FuturForest auquel participent les forêts publiques et privées. Celui-ci teste l’adaptation d’essences plus méridionales au climat local, comme par exemple à Oberhaslach.
En attendant les retours de ces études, propriétaires et usagers de la forêt devront garder à l’esprit la fragilité mais aussi la résilience des écosystèmes forestiers. Les coups de vents plus fréquents induisent un accroissement des risques de casses ou de chutes d’arbres. Ils impliquent donc également la vigilance de chacun : les propriétaires devront s’assurer de faire exploiter les arbres à risques, et les usagers devront respecter les contraintes de circulation en présence d’un chantier d’abattage. Enfin, chacun doit avoir à cœur le respect des milieux naturels, en évitant autant que possible de circuler hors des routes et sentiers, afin de limiter l’impact des activités humaines sur la flore et la faune, et conserver ainsi un environnement de qualité, dont on mesure encore plus aujourd’hui l’importance suite à la période de confinement.